NILAFAR ImageLRLes modèles numériques qui synthétisent nos connaissances du système climatique prévoient pour les décennies à venir des variations extrêmes du cycle de l'eau qui auront un impact sur les ressources naturelles et les populations. Dans la corne de l’Afrique, depuis plusieurs milliers d’années, des périodes de fortes et faibles moussons ont déterminé la disponibilité en eau dans les basses terres, ce qui a affecté drastiquement les dynamiques de peuplement humain. Comment ces populations se sont-elles adaptées à ces changements plus ou moins rapides de disponibilité en eau depuis 20,000 ans ? Comment l’homme s’adaptera aux changements climatiques et environnementaux futurs ?

Le projet NILAFAR vise à quantifier les fluctuations hydrologiques et à documenter leurs conséquences sur les communautés humaines, à la transition entre le monde des chasseurs-cueilleurs et le monde des agro-pasteurs, au cours des 20,000 dernières années, en Afrique du nord-est (en région Afar, Ethiopie & Djibouti). Il vise aussi à acquérir une meilleure compréhension des mécanismes à l’origine des fluctuations de la mousson africaine et des épisodes d’hyperaridités qui se sont installés en quelques centaines d’années dans le passé.

Ce projet est conçu sur une synergie disciplinaire et humaine en région Afar entre :

  • des missions de terrain en archéologie, paléoclimat (carottage du lac Abhé) et géomorphologie
  • de la modélisation du climat : échelle régionale (débit du Nil Bleu et de l’Awash) et télé-connection globale
  • des analyses en laboratoire afin de i) définir les stratégies de subsistance humaine telles que la pêche, l'élevage et le commerce ii) quantifier les fluctuations hydrologiques et leurs impacts sur l’érosion des sols à partir du couplage de biomarqueurs organiques (d2Hwax), des isotopes du lithium & néodyme et l’étude des diatomées (fonctions de transfert hydro-chimique).

Les attendus scientifiques sont :

  • Etablir un modèle de peuplement diachronique à grande échelle dans la région Afar
  • Mieux comprendre la co-évolution Homme-Environnement-Climat depuis 20,000 ans
  • A long terme, mieux comprendre la variabilité passée de la mousson en Afrique dans le passé afin de proposer des tendances hydrologiques futures et in fine aider à améliorer l’adaptation des populations face au défi de la raréfaction des ressources en eau.

NILAFAR Schema

Résumé du projet ANR NILAFAR :

Le projet NILAFAR se propose d'étudier l'impact des fluctuations hydrologiques de ces 20.000 dernières années sur les sociétés, à la transition entre le monde des chasseurs-cueilleurs et le monde des agro-pasteurs en Afrique du Nord Est. Il vise aussi une meilleure compréhension des mécanismes (forçages externes et rétroactions internes du système climat) à l’origine des fluctuations d’intensité de la mousson Africaine et des épisodes d’hyperaridité qui se sont installés en quelques centaines d’années. Lors de ces épisodes, le Sahara vert, ou African Humid Period, a vu le repli ou la dissémination des groupes humains, particulièrement mobiles. Dans un environnement qui a pu être aussi limitatif que stimulant du fait de l’alternance de ces phases hyperarides et humides, les sociétés ont innové vers de nouveaux modèles économiques, en passant d’une économie de prédation à une économie de production. NILAFAR se propose de quantifier les fluctuations hydrologiques en lien avec la mousson Africaine (à partir de sédiments lacustres et de modèles hydro-climatique) et d’explorer la corrélation entre le régime paléo-hydrologique et l’évolution de ces anthroposystèmes dans la vallée de l’Afar en Éthiopie et Djibouti. Le Sahara vert ou African Humid Period, caractérisé par de plus fortes précipitations qu’aujourd’hui, sera revisité à l’aide d’outils inorganique et organiques novateurs autorisant une quantification, à haute résolution temporelle (~100 years), des fluctuations hydrologiques des lacs et de l’altération chimique des sols éthiopiens. Les lacs Afambo, Gamari et Abhé et leurs bassins versants sont choisis pour leurs extrêmes sensibilités dans cette zone du Sahel ; ce sont des enregistreurs à haute résolution des changements de moussons et environnementaux qui se sont déroulés depuis le Pléistocène récent jusqu’à l’Holocène récent. L’originalité du projet est qu’il est conçu sur une synergie disciplinaire et humaine entre des études de terrain en région Afar (archéologie, carottage de lacs, géomorphologie, géomatique de ces lacs et de leurs bassins versants), des modélisations hydro-climatiques et une reconstruction des fluctuations hydrologiques à partir du couplage d’outils novateurs (isotopie du lithium, biomarqueurs) et d’outils classiques (isotopie du néodyme, étude des diatomées et les fonctions de transfert hydrochimique). L'établissement de modèles d'âges robustes, que ce soit pour les archives lacustres, les sols, et pour les implantations humaines qui se sont succédées dans la zone (à l'aide des méthodes de radionucléides, de datation 14C) sera une priorité de ce projet. En parallèle, des simulations climatiques à grande échelle seront utilisées pour étudier les mécanismes de changement de mousson, au cours de la dernière déglaciation/Holocène et un modèle de pluie-débit sera développé pour appréhender plus précisément les modifications des débits de la rivière Awash. A long terme, ces modèles seront utilisés pour établir des scénarios climatiques et hydrologiques futurs pour cette région. Les résultats permettront de consolider des scénarios futurs d’évolution des écosystèmes pour les populations à venir. En explorant la coévolution Homme-Ecosystème-Climat sur une large séquence chronologique, le but est de proposer des solutions à une meilleure adaptation des populations face aux défis de nos sociétés en termes d’agriculture et de ressources en eau, matière première dans ces pays en phase de développement d’infrastructures. Les retombées seront aussi de former des étudiants et futurs chercheurs pour comprendre le réchauffement climatique et augurer prudemment de l’avenir des régions arides. Cette transmission de savoir s’effectuera sur quatre années à travers une demande de post-doctorat pour la modélisation et pour l’archéologie ; une demande de thèse pour l’acquisition des données innovantes. Ce projet sera aussi l’occasion de former des étudiants éthiopiens sur le terrain et au sein de cursus universitaires.

PIs : Marie Revel, Lamya Khalidi, Nathalie Vigier, Guillemette Ménot & Laurent Bruxelles
Collaborateurs : Pierre Brigode, Sébastien Migeon, Pascale Braconnot, Masa Kageyama, Françoise Chalié, Florence Sylvestre, Fabien Arnaud, Eric Chaumillon, Maryline Montanes, Jérémy Jacob, Jessie Cauliez, Gourguen Davtian, Marzia Gabriele, Joséphine Lesur, François Bon, Clément Ménard, Louise Purdue, Lucie Coudert et Carlo Mologni
Dates : 2021-2025
Financements : ANR PRC 2021, 560k€

Vers le site web du projet : https://geoazur.oca.eu/fr/anr-nilafar