Sélectionnez votre langue

Communiqué de presse

Lundi 29 octobre 2012, 11h
International Low Frequency Array Telescope
Observatoire de Paris, Observatoire de la Côte d’Azur, CNRS

Un trou noir supermassif souffle
une bulle géante de gaz chaud

Utilisant le nouveau radiotélescope européen LOFAR (Low Frequency Array), des astronomes - dont les chercheurs de l’Observatoire de Paris, de l’Observatoire de la Côte d’Azur et du CNRS - ont obtenu l’une des meilleures images réalisées d’une bulle géante de plasma soufflée par un trou noir supermassif. Les observations ont été effectuées dans le domaine radio basses fréquences, entre 20 et 160 mégahertz (MHz), soit des longueurs d’onde entre 2 et 15 mètres. Au final, l’image montre comme un gigantesque ballon rempli de plasma émetteur radio. Les dimensions de l’objet dépassent celles d’une galaxie toute entière observée dans le visible.
Les trous noirs sont des objets si massifs qu’ils attirent toute matière et lumière. Certains sont actifs et absorbent du gaz et des étoiles de leur environnement. Cependant, une partie de cette matière ne tombe pas dans l’astre. Elle est expulsée en jets de particules, accélérées à des vitesses proches de celle de la lumière. Lorsque les jets ralentissent, ils créent une bulle de gaz chaud, qui peut aller jusqu’à englober la galaxie-hôte. Invisible aux télescopes optiques, cette émission diffuse est extrêmement lumineuse aux basses fréquences.

Le télescope LOFAR utilise près de 50 000 antennes très simples (dipôles) réparties en une cinquantaine de stations aux Pays-Bas, en Allemagne, au Royaume-Uni, en Suède et en France (station de radioastronomie de Nançay, unité de l’Observatoire de Paris et du CNRS, Cher, région Centre, près d’Orléans). Cet instrument unique est ainsi déployé sur des distances qui atteignent, parfois, plus de mille kilomètres.
Le résultat publié dans la revue européenne Astronomy & Astrophysics souligne le potentiel du réseau de LOFAR. Ces observations montrent les liens qui unissent le trou noir central super-massif, la galaxie qui l’héberge et leur environnement. Comme les espèces vivantes en symbiose, une galaxie et son trou noir mènent une existence intimement liée. La galaxie et son environnement alimentent le trou noir en gaz. En retour le trou noir renvoie de l’énergie, sous forme de puissants jets de particules, réchauffant la matière environnante. Les scénarios récents de formation de galaxies suggèrent que ce processus contrôle en réalité la formation stellaire dans les amas de galaxies.

 

Image en fausses couleurs de la galaxie M 87. La lumière visible apparaît en blanc et bleu (données Sloan Digital Sky Survey SDSS). L’émission radio enregistrée par LOFAR est codée en jaune-orangé. Au centre, l’émission radio très intense provient du jets de particules propulsé par le trou noir supermassif.

(LOFAR / Astron / MPA / Observatoire de Paris / Observatoire de la Côte d’Azur / CNRS)

 

L’image a été obtenue pendant la phase de tests préliminaires du radiotélescope LOFAR. Il s’est agi de pointer - en combinant numériquement les signaux des différents dipôles, non pas en orientant physiquement les antennes – la galaxie elliptique géante Messier 87 située au centre de l’amas de galaxies de la Vierge. Cette galaxie géante est 2000 fois plus massive que la Voie lactée et abrite en son sein l’un des plus gros trous noirs connus , ayant une masse atteignant près de six milliards de soleils. Il engloutit l’équivalent de la masse de la planète Terre en quelques minutes. Cette matière est convertie, pour l’essentiel, en jets de particules ultrarapides et, pour le restant, en rayonnement intense. Ces observations illustrent la violence des interactions entre les trous noirs supermassifs et leur environnement.
 

Collaboration

Ces travaux ont été menés par Francesco de Gasperin, du Max Planck Institute for Astrophysics Garching (Allemagne). Les coauteurs français sont : Cyril Tasse chercheur postdoctoral et Wim van Driel astronome, de l’Observatoire de Paris (laboratoire GEPI), ainsi que Chiara Ferrari, astronome adjointe à l’Observatoire de la Côte d’Azur (unité de recherche Lagrange) et Giulia Macario, chercheuse post-doctorat à l’Observatoire de la Côte d’Azur (laboratoire Lagrange).

Référence

L’étude M 87 at metre wavelengths : the LOFAR picture, est parue dans Astronomy & Astrophysics
 

http://dx.doi.org/10.1051/0004-6361/201220209


Contacts 

Observatoire de Paris

  • Cyril Tasse | chercheur post-doctorant | GEPI | cyril.tasse@obspm.fr | +33 (0)1 45 07 79 90 [Actuellement au SKA South Africa Project Office, au Cap en Afrique du Sud]
  • Wim van Driel | astronome | GEPI | wim.vandriel@obspm.fr | +33 (0)1 45 07 77 31 

Observatoire de la Côte d’Azur

Chiara Ferrari | astronome adjointe | chiara.ferrari@oca.eu | +33 (0)4 92 00 30 28

Max Planck Institute for Astrophysics

Francesco De Gasperin | MPA | fdg@hs.uni-hamburg.de | +49 89 30000 2196
 

Radboud University and ASTRON

Heino Falcke | h.falcke@astro.ru.nl | +31 24-36-52020.
 

ASTRON

Femke Boekhorst, PR & Communication | boekhorst@astron.nl | + 31 521 595 204

 

LOFAR en Europe et en France


LOFAR est un instrument révolutionnaire capable de détecter les ondes radio avec des longueurs d’ondes allant jusqu’à 30 mètres. Ces ondes radio sont normalement générées par de nombreuses activités humaines telles que la radio-diffusion, les signaux radar ou les communications par satellite. Elles sont également émises dans l’espace lointain par des objets exotiques tels que trous noirs, étoiles à neutrons en rotation et supernovae. Pour détecter ces ondes, LOFAR utilise des milliers d’antennes réparties dans toute l’Europe et combine les signaux dans un super-calculateur situé aux Pays-Bas. Une centaine de Gigabit de données par seconde est analysée en temps réel afin de fournir les images les plus détaillées jamais réalisées dans ce nouveau domaine d’énergie.


L’utilisation de LOFAR est coordonnée par ASTRON, l’institut néerlandais de radioastronomie, pour un consortium composé des Pays-Bas, de l’Allemagne, du Royaume-Uni de la Suède et de la France. L’observatoire de Paris, l’Observatoire de la Côte d’Azur, le LPC2E à Orléans, et la station de radioastronomie de Nançay sont directement impliqués dans l’utilisation et le développement de LOFAR et des précurseurs de SKA. En particulier, les laboratoires de l’Observatoire de Paris (GEPI/LESIA) et de l’Observatoire de la Côte d’Azur (Lagrange) sont impliqués dans l’exploitation scientifique de LOFAR (relevés extragalactiques, univers transitoire). L’imageur de LOFAR, qui est l’équivalent d’une optique adaptative numérique, est une pièce maîtresse nécessaire à son fonctionnement et a été presque entièrement développé à l’observatoire de Meudon. Beaucoup de solutions instrumentales et numériques développées pour LOFAR seront vitales pour les futurs projets de radiotélescopes comme le Square Kilometre Array (SKA).


En parallèle à l’exploitation scientifique de LOFAR, l’OP(USN,LESIA,GEPI,LERMA) et le LPC2E, en collaboration avec plusieurs autres laboratoire français et équipes européennes, ont développé un concept de "super station LOFAR" (LSS). Il s’agit d’une extension géante de la partie basses fréquences de LOFAR, à Nançay, qui pourra être utilisée conjointement avec LOFAR ou comme un instrument autonome, avec comme atout majeur une très grande sensibilité instantanée. Le design en a été réalisé dans le cadre d’un contrat ANR, le prototype construit à l’été 2012 est en test sur le ciel, et les financements pour la construction de l’instrument - renommé NenuFAR - sont activement recherchés.


En savoir plus
 

  • Communiqué de presse, 31 mai 2011

Inauguration, à Nançay, de la station française du radiotélescope européen LOFAR
La France partenaire du plus grand réseau d’antennes astronomiques du monde
http://www.grandpublic.obspm.fr/Ina...
 

  • Communiqué de presse national, mardi 1 février 2011

LOFAR, le plus grand réseau européen en radioastronomie, obtient des images à haute résolution du jet d’un quasar
http://www.grandpublic.obspm.fr/LOF...